Résumé
Il y a ce que l'on constate, ces pôles qui fondent et ces vents d'une violence inconnue, cette vie dont le nombre des espèces si rapidement s'amenuise, ces foules sans horizon et sans boussole, ces eaux qui montent, ces contaminations, ces embrasements inquiétants un peu partout. Il y a également ce qu'on peut lire, lorsque 15 000 scientifiques de toutes disciplines s'alarment et lancent ensemble un rappel de ce qu'il n'y en a plus pour longtemps à continuer à ce train, et que passé un certain seuil il sera trop tard. (Comme si le seuil n'était pas déjà loin derrière nous.) Et puis tout continue comme si de rien n'était : l'existence confortable administrée et sous vidéosurveillance, l'abreuvement continu au flux des divertissements dispensés par les fermes de serveurs et à celui des idioties récréatives du réseau, l'épanouissement béat de la mondialisation heureuse, son indifférence à tout ce qui n'est pas son propre miroir, la conviction qu'elle entraîne de sa perfection, de son progrès inévitable, de ses roues bien huilées.C'est cette inertie, ce déni de réalité, ce défaut majeur d'attention, cette indignité morale aussi, qu'examine ce livre, comme si l'humanité suivait un cours écrit ailleurs, ayant manqué le signal des quelques bifurcations qu'il lui aurait été loisible d'emprunterNon sans préserver les traces, photographiques ou pensives, de ce qui nous fut laissé en legs, parmi les ruelles à peu près désertes d'un vieux bourg de province où subsistent, entre les pavés disjoints, quelques unes de ces herbes que l'on dit folles - sans doute parce qu'elles n'avaient pas été prévues dans les calculs.