Résumé
Louis Althusser et Lucien Sève se sont connus à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm, après la guerre. Le premier était entré à « l'École » ou à « Ulm » comme on disait en 1939 et avait été mobilisé, le second avait 19 ans et avait fait ses études antérieures pendant la guerre.L'amitié des deux élèves passa par Hélène, militante communiste, la compagne de Louis Althusser, qui eut un rôle important dans l'adhésion des deux philosophes au PCF. Petit à petit une correspondance, d'abord principalement privée, puis rapidement politique et théorique, s'établit et ne cessera que peu de temps avant la mort de Louis Althusser, en 1990Les lettres présentées ici sont au nombre de 94, certaines très longues, d'autres laconiques. Le plus prolixe est Althusser : 69 courriers de sa plume - pas tous envoyés toutefois - contre vingt-cinq pour Sève. Le « caïman » de la rue d'Ulm est coutumier du fait...Plus du tiers des lettres est concentré sur la période 1960-1973. Les quinze dernières lettres, de 1974 à 1987, sont comme un monologue. Toutes sont d'Althusser, brèves, émouvantes sur la fin, la dernière : « Je voudrais te voir, oui »L'ensemble donne du débat qui les sépare peu à peu, sans rendre compte de leurs rencontres par ailleurs, une image certes très contrastée, mais nous font entrer dans le coeur des oppositions. Le stalinisme, la querelle de l'humanisme, la question de « l'essence humaine », psychanalyse ou théorie de la personnalité, quelques-unes des disputes les plus épiques entre marxistes sont abordées par les deux correspondants. Certaines lettres d'Althusser, non envoyées, sont particulièrement vives et dressent un tableau conflictuel des désaccords. Mais l'essentiel est l'échange des arguments sur des question souvent encore ouvertes, ou du moins qui ont compté dans l'histoire intellectuelle et politique des années 1960 à 1980Les lettres sont annotées par Lucien Sève, pour éclaircir quelques phrases allusives, et par Roger Martelli, auteur d'une postface historique sur l'ensemble de la période, pour présenter les faits et les protagonistes évoqués dans les courriers.