À la lecture de ces deux contes jumeaux aussi terribles que drolatiques, on se dit que leur titre ne nous a pas menti : c'est déciment bien écrit ! Dans Graphomanie, le lecteur suit les mésaventures d'un génie qui ne l'est qu'à ses yeux.Négligeant sa famille pour être reconnu comme écrivain, entouré de médiocres à qui il cherche à plaire tout en les méprisant, notre antihéros sent qu'à force de tomber, il va rebondir. Oui, mais quand ?Dans Le Verglas, le narrateur possède un superpouvoir, celui de voir l'avenir. Une chance ? Une plaie. Peut-être que le réel se supporte mieux quand on le déchiffre moins ?Chez Andreï Siniavski, l'auteur d'André-la-poisse, les destinées sont toujours de parfaites réussites en matière de ratage. Artistes sans oeuvre, perdants oubliant d'être magnifiques, malheureux en amour comme en affaire, telle est la faune carnavalesque d'histoires où seul le rire sauve du naufrage.Professeur de littérature en Union soviétique, André Siniavski (1925-1997) publie sous pseudonyme ses premiers textes en France. C'en est trop pour le pouvoir qui le condamne au Goulag en 1966. Ce procès fantoche de l'ère poststalinienne a une répercussion inattendue : il donne naissance à la dissidence en URSS. Craignant l'influence d'André Siniavski à sa libération, le KGB le contraint à quitter le pays. En exil en France, André Siniavski prouve que si son corps est brisé par les années de camp, son talent ne l'est pas. Il continue d'écrire une oeuvre d'une inventivité folle.En guise de préface, son fils, l'écrivain Iegor Gran, rend hommage à la causticité et à la farouche indépendance de son père.