Construction de mythes, évocation d'un âge d'or, interprétation à des fins de propagande... Quand le passé est convoqué, c'est souvent pour légitimer, figer et déformer des moments d'histoire, dont l'usage au présent vise à servir une cause. Cet ouvrage, fruit d'un travail collectif mené depuis plusieurs années, tente de penser une autre relation au passé à l'aide de la notion de référence : il s'agit de saisir la façon dont le passé est parfois réactivé par des sujets qui se le réapproprient. Moteur d'action et opérateur de pensée, ce passé dynamique, inachevé, subsiste en effet dans les mémoires souterraines d'un collectif, où, à la fois rêvé et perdu, il attend son actualisation. Chaque chapitre du livre analyse un moment historique à la lumière de cette notion de référence : la Grande Famine en Irlande entre 1845 et 1851, les destructions d'églises pendant la Commune, le coup d'Etat du 6 septembre 1930 en Argentine, la notion de martyr dans la Tunisie contemporaine, celle de peuple en Italie au milieu du XIVe siècle...Elaborer la notion de référence, c'est repenser notre façon de faire de l'histoire : c'est restituer à la connaissance du passé tout son potentiel critique, qu'il s'agisse d'y trouver ces références nécessaires à l'action, ces possibles contenus dans les expériences d'hier, ou d'échapper au tragique re-jeu du passé.