Au début du XIXe siècle, les rivalités dans cet espace hautement convoité étaient analysées par une vaste littérature sur la " question d'Orient ", alors qu'il s'agissait plutôt des rivalités implacables entre puissances européennes avides de se partager les vastes territoires de l'Empire ottoman. Ce nouvel ouvrage de Georges Corm rétablit les continuités et les ruptures entre cette ancienne question d'Orient et ce que son auteur appelle la " nouvelle question d'Orient ". Laquelle débute après la Seconde Guerre mondiale et donne naissance à son tour à des violences ininterrompues dont le monde entier vit aujourd'hui le paroxysme. Les conditions de la décolonisation, l'émergence de l'Etat d'Israël, la guerre froide et l'instrumentalisation de la religion musulmane dans les conflits de la période en sont autant de facteurs explicatifs. Georges Corm dénonce aussi bien les tendances hégémoniques de l'Alliance atlantique que le " chaos mental " qui s'est souvent installé à ses yeux dans les analyses médiatiques légitimant les interventions des puissances occidentales. Lesquelles ne sont qu'un rebondissement amplifié de l'ancienne question d'Orient, leur cadre intellectuel étant aujourd'hui actualisé par la notion fantaisiste de " choc des civilisations " propagée par Samuel Huntington et héritée du racisme colonial. Le développement exponentiel du terrorisme en provenance de cette partie du monde est le résultat de ce dérèglement de la raison. Il peut se comparer aux effets que produit le dérèglement climatique en termes de catastrophes naturelles, elles-mêmes dues à une déraison économique et consumériste.