Lorsque après avoir enseigné en ZEP l'auteur est muté dans le lycée prestigieux d'un quartier chic, il découvre à quel point l'école est gangrenée par l'argent. Quand on a été élevé dans l'idée que l'école française se devait d'être publique, gratuite et méritocratique, c'est un vrai choc culturel. Il faut dire que la compétition pour accéder aux meilleures formations est devenue féroce. Elle angoisse les parents, prêts à de lourds sacrifices pour assurer l'avenir de leurs enfants. Dans cette course effrénée, tous les moyens sont bons : déménager pour intégrer les établissements réputés, payer des formations coûteuses, privées ou publiques, du soutien scolaire et autres coaching, stages à l'étranger et préparations aux concours. Quant au tourisme scolaire, il permet de contourner la sélection - moyennant finances - pour obtenir des diplômes prestigieux. Certes, «petits cours» et écoles payantes ne datent pas d'hier. Mais un inventaire systématique montre que nous avons changé d'échelle et que notre système éducatif en est complètement transformé. Des groupes financiers achètent et revendent des écoles par dizaines. Les universités elles-mêmes multiplient les formations payantes. La mue a été rapide, mais discrète, sauf pour ceux qui y sont directement confrontés. L'énorme pression du chômage des jeunes, l'appauvrissement de l'Etat et le dynamitage des diplômes par la construction européenne sont passés par là. Un état des lieux édifiant qui s'adresse aux parents d'élèves, aux enseignants, comme à tous ceux qui veulent comprendre les nouvelles règles du jeu et l'ampleur de la révolution en cours.