Alors que le soleil va se lever sur le Serengeti, les hyènes se réveillent. Avec cette petite séquence de vie quotidienne, vibrant hommage à Keizaburo Tejima, dont les albums sur la faune du Hokkaido demeurent des classiques du genre, Yann Fastier met en scène un groupe de hyènes avec l'intention de déconstruire un certain nombre d'idées reçues à propos de cet animal et lui rendre enfin justice. Il entend bien détrôner une fois pour toute le « roi des animaux » sur-représenté dans les livres pour enfants. La hyène tachetée (Crocuta Crocuta) est en effet un animal comme les autres, prédateur redoutable à l'organisation sociale complexe et originale, ni plus ni moins charognard que son principal concurrent, le lion. La narration est pensée pour les plus petits (séquençage très poussé, vocabulaire simple) et refuse tout anthropomorphisme. Une partie documentaire étoffée l'accompagne, histoire de finir de mettre les points sur les i. Sa maîtrise de la linogravure trouver ici un terrain de jeu idéal pour s'exprimer avec le talent auquel il nous a habitué. Au-delà de cette réhabilitation et de la dénonciation d'une mauvaise réputation injustifiée, il s'agit bien sûr pour lui d'affirmer, d'une façon plus générale, la nécessité de ne jamais s'en tenir aux préjugés en abordant l'Autre et de le voir tel qu'il est.