De tous les textes de Svetlana Alexievitch, celui-ci est le plus déchirant. Car qu'y a-t-il de plus terrible que l'enfance dans la guerre, de plus tragique que l'innocence soumise à l'abjection de la violence et de l'anéantissement ? Les personnages de ce livre ont entre trois et douze ans. Garçons et filles, ils ont grandi au cœur des ténèbres du plus inhumain des conflits, cette Seconde Guerre mondiale dont les plaies restent toujours béantes soixante ans après. Publié une première fois dans une édition tronquée, mutilée par la censure encore soviétique à la fin des années quatre-vingt, jamais traduit en français, Derniers témoins parait aujourd'hui pour la première fois dans sa version définitive, achevée en 2004. Il a donc fallu à Svetlana Alexievitch près d'un quart de siècle pour mettre un point final à ce monument de la littérature, dressé pour commémorer la plus injuste des souffrances. La poésie inhérente à l'enfance lui confère une force d'évocation qui nous touche au plus profond de nous-mêmes. Bouleversant par sa charge de vérité, émouvant jusqu'à l'insoutenable, Derniers témoins change notre regard sur l'histoire, sur le monde, sur la guerre, sur l'enfance, sur la vie.