Placés sous le signe du temps qui passe, les poèmes d'Alcools recréent tout un monde : celui des lieux où son existence a conduit leur auteur et dont ils entrecroisent les souvenirs, comme celui de ces grandes figures féminines qui ont traversé sa vie. Mais ils sont en même temps imprégnés d'une culture à la fois populaire et savante, qui permet au poète de recueillir l'héritage du passé tout en s'ouvrant à la modernité de la vie ordinaire - les affiches ou bien les avions.On aurait ainsi tort de croire que ce recueil où s'inaugure la poésie du XXe siècle soit, à sa parution en 1913, un livre de rupture. Nourri de poèmes anciens aussi bien que récents, le chant que font entendre ceux d'Apollinaire, à l'oralité si puissante, tire ses ressources du vers régulier comme du vers libre, et il ne s'agit pas pour le poète de céder au simple plaisir du nouveau : seule compte ici sa liberté et ce que lui dicte la voix inimitable d'un lyrisme qui n'a pas cessé de nous toucher.