Me demandant ce qui le rendait encore aussi passionnant à lire plus d'un demi-siècle après sa mort, je me suis aperçu qu'au-delà de son style littéraire et de son esprit souvent visionnaire, c'est sa brutale honnêteté qui conserve toute leur force à ses textes. Il regarde les choses en face. Non pas de façon froide et dépassionnée, mais au contraire en s'impliquant le plus totalement possible. «Sa dénonciation de l'impérialisme et du colonialisme, de la pauvreté et du capitalisme est d'autant plus efficace qu'il en connaît les mécanismes de l'intérieur. Quand il s'engage dans la guerre d'Espagne en 1936, c'est un peu comme si un intellectuel occidental contemporain partait se battre contre les Serbes à Sarajevo ou contre l'État islamique en Irak ou en Syrie. «J'ai réalisé, en allant sur les lieux où se sont déroulés les principaux événements de la vie d'Orwell, à quel point ils avaient été formateurs dans sa carrière d'écrivain. Du collège d'Eton, le bastion de l'élite britannique, où il est boursier jusqu'à l'île écossaise de Jura, où il use ses dernières forces à écrire 1984, en passant par la Birmanie où il est un rouage de l'impérialisme, les taudis de Manchester et de Paris, le front de la guerre d'Espagne et la Barcelone des luttes intestines de la République espagnole, on découvre comment la vie et les expériences d'Orwell inspirent et irriguent en permanence son oeuvre.» A. J. Adrien Jaulmes est grand reporter au Figaro, lauréat du prix Albert-Londres en 2002 et du Prix Bayeux des Correspondants de guerre en 2007, il est l'auteur d'Amérak et a préfacé Le Monde en 2035 vu par la CIA, publiés aux Éditions des Équateurs.