Elle a beau ne le porter dans son ventre que depuis sept mois, on comprend vite que cet enfant charpente toute la vie de Joana. Il est la réponse à son désarroi d'orpheline, l'aboutissement du couple qu'elle forme avec le pâle Jorge, plus qu'une raison d'être, une revanche. Aussi, quand elle se réveille d'un cauchemar prémonitoire, elle a perdu les eaux, mais non ses illusions. La bête immonde entre alors dans l'arène hospitalière, baignée par la lueur pâle des néons fatigués. De veulerie en lâcheté, chacun des pitoyables acteurs de ce drame se montre virtuose dans l'art d'esquiver l'inéluctable. Courant derrière son délire, jusqu'à quel point Joana pourra- t-elle refuser de regarder en face la nudité obscène de l'échec ? Dans ce deuxième volet de la trilogie qu'il consacre aux paternités ratées, Valério Romão livre un récit impitoyable, tenant à la fois de l'étude clinique sur l'hystérie et du cinéma de Buster Keaton. Avec la crudité d'un Jean Rustin (seconde manière), il célèbre les noces sinistres du désespoir et du dérisoire.