«À son grand étonnement, il sottotenente Mancuso vivait fort mal cette guerre, plus prodigue en déconvenues qu'en aventures homériques. Désormais éloignée de ses bases arrière érythréennes, la troupe manquait de tout et ne progressait qu'avec une lenteur extrême à travers les paysages calcinés du Tigré. Mancuso luttait à chaque instant pour ne pas tomber de son cheval, cette méchante carne qu'il talonnait avec d'autant plus de hargne qu'il voyait les askaris, impassibles, marcher dans cette intolérable fournaise sans même ciller. Sa peau, horriblement cloquée sous la morsure du solleone - ce soleil-lion affamé -, ressemblait désormais à cette terre craquelée d'où rien ne semblait devoir pousser, hormis le fléau des puces et des tiques qui le harcelaient sans répit.» De sa jeunesse vouée au culte de Mussolini, en passant par la seconde guerre d'Abyssinie, jusqu'à son retour en Italie et au désenchantement, le parcours d'Attalo Mancuso dresse un portrait exemplaire d'une époque. Presque un devoir de mémoire, contre l'insouciance des gens comme il faut pour qui tout cela était normal.