Résumé
« Voilà, oui, ce sont des nappes, et je les tire vers moi, il n'y a pas à se forcer beaucoup, elles viennent d'elles-mêmes, c'est comme un tuilage, une glissade. Étrange récolte à vrai dire, qui ne fourre dans mon sac que des fantômes : là où ni la conscience de soi ni la naissance ne fournissaient de points fixes auxquels se raccrocher, les souvenirs viennent en masses fractionnées, c'est la phrase qui tourne avec eux : il y a une hélice, un mouvement, un sillage, mais nous sommes en pleine mécanique des fluides, c'est comme une sorte de ralenti discontinu ou comme un fondu enchaîné parfois flou, un paysage de turbulences et de surimpressions ou encore, et plus exactement si l'on doit garder la métaphore du cinéma, ce sont des rushes qui défilent, sans montage, mais comme portés par des courants. » Dans cet autoportrait vagabond, Jean-Christophe Bailly, poète, philosophe, dramaturge, parvient à dessiner ce qui serait le coeur de sa fabrique artistique et son livre devient peu à peu un véritable voyage non seulement vers l'origine mais aussi vers la littérature et le théâtre. Vers tout ce qui est bâti dans le mouvement. Et surtout vers tous les lieux qui l'ont formé. Barcelone, Berlin, Strasbourg, Paris, la Bretagne, la Russie, la Chine ou encore Olonne, la ville imaginaire. Le livre devient alors ouverture. Les images se cognent, rebondissent, en engendrent d'autres et prennent alors une vraie liberté. On traverse les années, on enjambe les villes, il y a une véritable euphorie de la mémoire qui contamine le lecteur. Une peinture « résolument moderne », un poème-toupie, un chant.