Dans le HLM de Babel coincé entre deux boulevards, un Kurde de Syrie coincé entre deux chaînes de télévision regarde sa patrie livrée au chaos. Chaque jour, il s'échappe pour une promenade dans le quartier et échange quelques silences avec ses voisins. Il y a le Serbe bosno-croate multi-cambriolé, les deux jeunes Maliens à la foi tenace, la Tamoule menue en froid avec sa fille, l'ancien professeur sénégalais devenu marabout de boîtes aux lettres. Il y a aussi la Russe du premier, si belle avec ses fossettes et ses yeux qui scintillent comme la Neva, qui un jour peut-être l'invitera à prendre le thé chez elle. Il y a même un couple de Français. Le premier contact avec Les locataires du quatrième a été provoqué par la Japonaise devenue par la force des choses « La Jap du septième ». Un jour que nous revenions d'Auchan chargés de nos courses, elle a vu le toutou et a demandé à ses maîtres si elle pouvait le caresser. « Elle s'appelle comment ? » Les deux Français étaient fiers comme Artaban qu'on s'intéressât à leur chien, qui comme eux se faisait vieux et était perclus de rhumatismes. « C'est un garçon, madame, s'est hâtée de rectifier la Française, et il s'appelle Roméo. » Le monde est rond comme une tour carrée de HLM, et Le Syrien du septième étage est le plus tendre hommage rendu aux petites gens de tous les pays, de tous les appartements de la Terre.